"Alexis ou le traité du vain combat" de Marguerite Yourcenar, 1929, édition revue par l'auteur en 1952, Plon

Publié le par Cécile

2013-09-29-20.48.44.jpgJ'essaie, pendant les vacances d'été, de me plonger dans au moins une oeuvre dite classique. Cette année, sur les conseils d'un collègue, j'ai emmené "Alexis ou le traité du vain combat" de Marguerite Yourcenar.

 

Donc, plus que l'intrigue connue du plus grand nombre, c'est au style qu'il faut goûter.

Néanmoins, pour mémoire, l'ensemble du texte est une lettre qu'un jeune époux malheureux écrit à son épouse pour lui avouer son impossibilité à supporter la vie conjugale. Il ne s'agit pas pour lui d'accabler son épouse, bien au contraire, mais de lui avouer ses penchants à l'époque inavouables.

 

"J'étais absolument seul. Je me suis tu, jusqu'à présent, sur les visages humains où s'est incarné mon désir; je n'ai interposé, entre vous et moi, que des fantômes anonymes. Ne croyez pas qu'une pudeur m'y contraigne, ou la jalousie qu'on éprouve, même à l'égard de ses souvenirs. Je ne me vante pas d'avoir aimé. J'ai trop senti combien peu durables sont les émotions les plus vives, pour vouloir, du rapprochement d'être périssables, engagés de toutes parts dans la mort, tirer un sentiment qui se prétende immortel. Ce qui nous émeut chez un autre ne lui est après tout que prêté par la vie. Je sens trop bien que l'âme vieillit comme la chair, n'est, chez les meilleurs, que l'épanouissement d'une saison, un miracle éphémère, comme la jeunesse elle-même. A quoi bon, mon amie, nous appuyer à ce qui passe ?" (p.100-101)

 

"Et maintenant, je vous dis adieu. Je pense, avec une infinie douceur, à votre bonté féminine, ou plutôt maternelle : je vous quitte à regret, mais j'envie votre enfant. Vous étiez le seul être devant qui je me jugeais coupable, mais écrire ma vie me confirme en moi-même; je finis par vous plaindre sans me condamner sévèrement. Je vous ai trahie; je n'ai pas voulu vous tromper. Vous êtes de celles qui choisissent toujours, par devoir, la voie la plus étroite et la plus difficile : je ne veux pas, en implorant votre pitié, vous donner un prétexte pour vous sacrifier davantage. n'ayant pas su vivre selon la morale ordinaire, je tâche, du moins, d'être d'accord avec la mienne : c'est au moment où l'on rejette tous les principes qu'il convient de se munir de scrupules. J'avais pris envers vous d'imprudents engagements que devait protester la vie : je vous demande pardon, le plus humblement possible, non pas de vous quitter, mais d'être resté si longtemps." (fin)

 

PS : la couverture du texte est celle de la version que j'ai trouvée à la bib que je fréquente assidûment et qui a réussi à passer à travers les mailles du filet du ... désherbage ! Plus pour très longtemps ! 

Publié dans Romans francophones

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