"Tangente vers l'est" de Maylis de Kerangal chez Verticales, coll. "Minimales", 2012
C'est dans le Transsibérien qu'Hélène, une Française, croise le chemin d'Aliocha. Elle a précipitemment quitté l'homme qu'elle aimait et pris ce train légendaire.
Aliocha, lui, s'en va vers une destination inconnue, les futurs soldats n'ayant pas connaissance de leur lieu d'affectation. Et Aliocha ne se résigne pas à devenir soldat en Sibérie, loin de chez lui. Il fait donc le projet de descendre du train avant la destination officielle des appelés embarqués et d'échapper à la vigilance du gradé chargé de les surveiller.
J'ai découvert Maylis de Kerangal grâce à "Naissance d'un pont" et j'apprécie énormément son écriture maîtrisée, à la fois littéraire et à la spontanéité travaillée, qui en très peu de mots parvient à mettre en lumière la sensibilité des personnages.
Un beau moment de lecture.
"Aliocha redoute que le jour pointe. Les derniers appelés sont tous allés dormir et il se ramasse dans sa solitude, l'amertume lui pique la gorge, l'amertume ou le mauvais tabac, il ne sait plus, se sent piégé dans un ressac de terreur et de rage froide, le sale mélange : à Krasnoïarsk, la fuite lui a refusé sa ligne pure, elle s'est dérobée sous ses pas. A présent, il faut tenir, temporiser, attendre de nouveau une grosse ville où il pourrait se cacher, se refaire et gagner de quoi repartir vers l'ouest. Apprendre la patience. Rester calme, ne pas faire n'importe quoi, parler à n'importe qui ou descendre n'importe où (...)." (p.37-38)